03 avril 2009

La récession pour contrer l’embonpoint

L’hypothèse a été maintes fois confirmée par les scientifiques : le bonheur favorise la prise de poids. En cette période de morosité économique, les histoires de bonheur sont de plus en plus rares. Comment être heureux lorsqu’on perd son emploi, que l’on paie l’épicerie avec la carte de crédit ou que l’on envisage déménager dans un refuge? Selon les pronostics, les nord-américains, les plus grosses personnes de la planète, profiteront de la récession pour affiner leur silhouette. Ils seront tristes, pauvres et dépressifs, mais au moins, ils seront minces.

Nombreuses sont les raisons qui expliquent la corrélation entre le malheur et la minceur. Dans un contexte de creux de vague économique, les déboires financiers sont souvent responsables des premiers kilos perdus. Le sociologue R. Côté explique : « quand on a pas d’argent, on coupe dans l’épicerie. Quand on coupe dans l’épicerie, on coupe dans les repas. Quand on coupe dans les repas, on mange moins donc on maigrit ».

Toujours selon M. Côté, les gens qui n’ont plus d’argent, « ont également le réflexe de sabrer dans le budget alloué au transport ». La plupart d’entre eux délaissent leur voiture et se tournent vers le transport en commun. Prévenu de l’afflux massif et imminent de nouveaux usagers, la STM ne devrait pas réagir. Du moins pas pour l’instant comme nous l’indique un haut-responsable qui préfère garder l’anonymat : « on traversera le pont quand on sera rendu à la rivière. Attendons la crise; ensuite on paniquera ».

Le déséquilibre entre l’offre et la demande affectera le comportement des usagers du transport en commun et le rendra plus sportif. « Les plus tenaces continueront d’utiliser l’autobus ou le train. Mais ils devront effectuer de longs trajets debout, participer aux bousculades et se battre pour conserver leur place. L’exercice et la surpopulation entraineront une sudation excessive chez les usagers. À long terme, prendre le transport en commun rendra les gens belliqueux mais les fera aussi maigrir », ajoute M. Côté. Le sociologue raconte que les êtres de nature énergique et agressive ne parviendront pas à s’adapter au chaos qui règnera dans les autobus et les trains. « Ils préfèreront opter pour le vélo. Une bonne façon pour eux d’expulser la rage engendrée par leur état miséreux. Ils se défouleront en coupant les automobilistes et, à l’occasion, en frappant un piéton. Le piéton étant, évidemment, le citoyen appauvri le plus vulnérable physiquement et psychologiquement entre tous… »

Heureusement, le portrait social brossé par M. Côté n’est pas tout noir : « la bonne nouvelle c’est que tout ce beau monde là se débarrassera de leur surcharge pondérale. C’est quand même pas rien! Et tout ça sera aussi très bon pour l’environnement. Il faut voir le côté positif des choses! ».

Moins de crises cardiaques, plus de maladies mentales

Au-delà de la détresse financière, c’est la détresse psychologique des individus affectés par la récession qui leur permettra de conserver leur poids santé nouvellement acquis. La peur de ne plus jamais trouver d’emploi, d’être jeté à la rue ou même la peur de mourir engendrera beaucoup d’anxiété chez certains citoyens nord-américains. La psychologue D. Tremblay explique les conséquences de l’anxiété sur le corps humain : « l’anxiété affecte directement le système digestif. Plusieurs sujets anxieux perdent complètement l’appétit. D’autres souffrent de reflux gastriques ou de surexcitation intestinale. Quand on mange pas ou qu’on expulse après chaque repas, on maigrit automatiquement ».

L’anxiété, qui devrait gagner progressivement la population dans les mois à venir, aura le bienfait de désengorger les services de cardiologie de nos hôpitaux. « Les gens minces ne souffrent généralement pas de problèmes cardiaques. Les artères sont belles. Pas de cholestérol. Le sang est clair… particulièrement chez les gens anxieux qui se traitent en buvant de l’alcool », estime le cardiologue R. Turcotte, soulagé par la perspective de journée de travail moins chargées. « Les maladies du foie, c’est pas nous autres qui s’occupent de ça!

Si une explosion de cirrhose du foie est effectivement à prévoir chez la toujours plus malheureuse population nord-américaine, d’autres types de maladies sont aussi sur le point de frapper fort selon la psychologue D. Tremblay. « Du malheur nait l’anxiété et de l’anxiété nait une panoplie de maladies mentales dont la dépression et la bipolarité. Ma prédiction? Avant longtemps, les nord-américains seront pauvres, tristes et fous. »

Oui mais au moins, ils seront minces.
***Les noms des intervenants utilisés dans ce texte sont fictifs. En fait, tous nos intervenants le sont. Toute ressemblance avec qui que ce soit de réel n’est que pure coïncidence.